Description


Bienvenue sur mon site dédié aux roses anciennes et modernes. Laissez-moi vous conter l'histoire de jardins remarquables, vous présenter des roses méconnues ou oubliées, vous conseiller de beaux livres...

Ce blog d'amateur est parfaitement libre et indépendant, je ne perçois aucun avantage, aucune rétribution de qui que ce soit. Sa seule vocation est le partage d'informations. Si vous empruntez une photo ou un texte de mes articles, veuillez citer vos sources comme je le fais moi-même. Les photos ne sont pas libres de droit. Pas d'utilisation commerciale.

N'hésitez pas à laisser en message vos remarques, vos avis... J'y répondrai avec plaisir.

jeudi 8 juin 2023

Cuisse de nymphe émue

ou rosa alba incarnata 

Rosier considéré comme un rosier alba dans la nomenclature actuelle, mais qui a été classé parfois en Damas (cf. Dumont de Courset), ou simplement en sous-espèce de gallique (cf. Jules Gravereaux). En voici les mentions dans les textes anciens :
  • rosa incarnata - the carnation rose (Parkinson, 1629)
  • rosa incarnata - the blush rose (Rea, 1665)
  • rosa incarnata - the blush rose (Miller, 1732)
  • rosa incarnata - the blush rose = Maiden-blush (Miller, 1754)
  • Maiden's blush rose (Weston, 1770)
  • rosier incarnat (Guillemeau, 1800)
  • rosa alba rubicunda plena- die Jungfrau Rose (Roessig, 1801) [figure]
  • rosa truncata virginalis - la rose des demoiselles (Bertuch, 1802)
  • rosier incarné = rosa virginalis (Sedy, 1810)
  • Nymphe émue (Guerrapain, 1811)
  • damascena carnea virginalis (Guerrapain, 1811)
  • rosa virginalis = rosa incarnata Miller (Dumont de Courset, 1811)
  • rosa virginalis (Van Cassel, 1813)
  • Cuisse de nymphe émue (Mordant de Launay, 1813)
  • rosa virginalis Ait. = rosa incarnata Mill. = rosier virginal (Audibert, 1817)
  • rosa alba incarnata, cuisse de nymphe émue (Redouté, 1817)
  • Cuisse de nymphe émue - rosa alba incarnata (Thory, 1820)


Ce rosier ancien est désormais identifié comme étant rosa incarnata. Mais à ma connaissance, il n'est pas commercialisé sous cette appellation en France. Est-il toujours conservé à la Roseraie de L'Haÿ-les-Roses ? Ce conservatoire des roses anciennes, près de Paris, le possédait pourtant début 1900 mais il semble disparu. A moins qu'il ne soit cultivé sous un autre nom.

Rosa alba incarnata fait figure de rose historique et a longtemps été assimilé au rosier actuel Cuisse de nymphe (Great Maiden's blush). Charlotte Testu, dans son ouvrage sur les roses botaniques, avait bien marqué la différence. En revanche, François Joyaux, ne le connaissant pas, l'a confondu avec Great Maiden's blush. Les rosiéristes ont malheureusement suivi cette voie. 

Les rosiers Cuisse de nymphe émuequi sont vendus en France, sont souvent, en réalité, la variété Félicité Parmentier. L'erreur provient de la roseraie-conservatoire du Val-de-Marne qui cultive cette rose sous ces deux noms. 

Les rosiers Cuisse de nymphe qui sont actuellement sur le marché sont la variété Great Maiden's Blush alias Grande Cuisse de nymphe, aux aiguillons droits à large base et aux réceptacles en forme de dé à coudre.  

Devant toutes ces confusions, j'ai eu un mal fou pour me procurer ce rosier. Je l'ai finalement trouvé à la pépinière Roses Loubert, sous l'appellation erronée Félicité Parmentier !
dans mon jardin, floraison en mai

Je comprends le grand amalgame concernant ce rosier. Ses fleurs ressemblent comme deux gouttes d'eau à celles de Cuisse de nymphe (Great Maiden's blush). Leur couleur, au départ et par temps frais, est franchement rose. Elles pâlissent très rapidement et finissent blanches. L'observation de l'arbuste (aiguillons et feuillage) permet de les différencier. De plus, les boutons de Rosa incarnata sont rose clair, alors que ceux de Cuisse de nymphe sont crème.


Comme pour toutes les roses anciennes, il faut se référer aux descriptions d'époque pour être sûr d'être en présence de la bonne variété. Ses caractéristiques sont les suivantes :
Rosa incarnata est dans la plupart des cas semblable à rosa alba minor [la petite rose blanche à centfeuilles, notre actuelle rosa alba maxima], à la fois pour la croissance de l'arbuste (hauteur d'un rosier de Damas) et la taille de la fleur. La plante n'est pas très grande mais très épaisse. La fleur est d'un rose lumineux, coloris variable d'une fleur à l'autre. Certaines sont plus pâles que d'autres. Elles ont un petit parfum. (cf. Parkinson)  
Tiges unies, hautes de trois à quatre pieds et plus, sans épines ou presque sans épines ; feuilles velues en dessous ; pédoncules armés de quelques petites épines ; calice à moitié ailé ; ovaires ovales ; odeur de musc. (cf. Miller)
Les fleurs ne sont pas pleines mais très doubles et larges. Elles ont cinq ou six rangs de larges pétales tout à fait ouverts avec des ovaires allongés rétrécis près du calice. (cf. Dumont de Courset) 
Friedrich Justin Bertuch, 1802

Sources :
William TURNER, A new Herball, 1568
John PARKINSON, Paradisi in sole paradisus terrestis, Londres, 1629. Réédité en 1909, voir p.412
Philip MILLER, The gardeners and florists Dictionary, Londres, 1724
Philip MILLER, The gardeners Dictionary, vol. II, Londres, 1735
Laurent de CHAZELLES, Dictionnaire des jardiniers, vol. 6, p.302, Bruxelles, 1788
GUILLEMEAU, Histoire naturelle de la rose, p.85, Paris, 1800
ROESSIG, Die Rosen, nach der Natur gezeichnet und colorirt mit kurzen botanischen Bemerkungen, 1801, figure No. 25
BERTUCH, Bilderbuch für Kinder, vol. 4, 1802 
DUMONT-COURSET, Le Botaniste cultivateur, Tome 3, p.348, Paris, An X (1802)
Nouveau Dictionnaire d'Histoire Naturelle, Vol. XIX, 1803
Nouveau cours complet d’agriculture théorique et pratique, T. 11, p.259, Paris, 1809
DUMONT DE COURSET, Le Botaniste cultivateur, 2ème édition, Tome 5, p.478, Paris, 1811
T. GUERRAPAIN, Almanach des roses, 1811, p.15
REDOUTE, Les Roses, 1817, p.98
DE PRONVILLE, Nomenclature raisonnée du genre rosier, Paris, 1818
THORY, Prodrome de la monographie des espèces et variétés connues du genre rosier, 1820, p.96
Jules GRAVEREAUX, Les roses cultivées à L'Haÿ en 1902, page 29, rosier n° 126.

(photos : Karin Schade)
Pour illustrer cet article, j'ajoute les clichés de Karin Schade, qui a retrouvé le "vrai" Cuisse de nymphe émue, au rosarium allemand de Sangerhausen.  
Une notice botanique, très intéressante, est consultable aussi sur l'incontournable site RoseBiblio ⇨ Rosa_x_alba_L._var._incarnata_(Mill.)_Weston



Il arrive de temps en temps que des fleurs entièrement roses ou mi-rose pâle, mi-blanches apparaissent. Elles ont un petit œil vert au centre. Le feuillage gris-vert est composé de 5 à 7 folioles ovales, allongées et pointues aux dents profondes et pointues. La forme concave des feuilles aux bords relevés est typique de ce rosier. Les tiges sont pourvues de vigoureux aiguillons crochus rouge-brun. Les fleurs sont suivies de cynorrhodons ovales, allongés, rouges et brillants, presque sans soies.

R. incarnata Mill. / R. alba var. incarnata (Mill.) Pers. / R. carnea Dum.-Courset / R. provincialis var. incarnata (Mill.) Martyn 
Le nom de R. incarnata a suscité beaucoup de confusion. Tel qu'utilisé par certains botanistes pré-linnéens, cela, ou le pluriel Rosae incarnatae, signifiait ce que l'on appelle maintenant R. damascena, tandis que certains botanistes français du siècle dernier considéraient que la R. incarnata de Miller était une forme de R. gallica avec une faible densité, des branches armées et des folioles composées de glandes. Une comparaison entre des spécimens d’herbiers authentiques montre toutefois que R. incarnata de Miller est identique à la «Cuisse de Nymphe» des jardins français. Le nom anglais de celui-ci - «Maiden’s Blush» - est parfois attribué à William Hanbury, dans un charmant passage à ce sujet dans son Compleat Body of Gardening (1770-1771). En fait, Miller l’a lui-même utilisé dans l’édition de 1752 de son dictionnaire. Le Maiden’s Blush se distingue de R. alba par la couleur de ses fleurs, ses tiges presque non armées, ses folioles plus nombreuses (la plupart du temps sept) et par la présence de nombreux piquants glandulaires en forme d’aiguilles sur les rameaux en fleurs sous les bractées. C'est presque certainement le même que le R. incarnata de Parkinson et une très vieille rose. Miller ne connaissait apparemment pas le "Great Maiden’s Blush" (R. alba var. Regalis Thory), qui est maintenant plus courant dans les jardins. Cependant, il figure dans la Flora Anglicana (1775) de Weston sous le nom de Great Maiden’s Blush Rose, avec R. incarnata major comme nom latin.
inTrees And Shrubs Hardy In The British Isles, 8th Edition Revised, Vol. IV, W.J. Bean, 1981


10 commentaires:

  1. Et bien j'ai hâte de découvrir la floraison de mon cuisse de nymphe émue ... ou pas !!! ...et de t'en montrer les photos pour que tu puisses me dire ce que tu en penses !!! pour l'instant... pas l'ombre d'un bouton alors j'espère qu'il ne jouera pas les capricieux encore cette année !!! ta première photo (très belle !) est la copie presque conforme d'une photo que j'ai fait l'année dernière de mon stanwell perpetual !!! hou la la ! je viens peut être de dire une grosse bêtise mais la ressemblance m'a surprise ... bonne soirée Alix :)

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. De retour de vacances, je reprends le fil des commentaires.
      Non, tu ne dis pas une bêtise ! La couleur et la forme sont semblables. Stanwell perpetual a juste beaucoup plus de feuilles et d'aiguillons...
      Bises :)

      Supprimer
  2. Comme Nathalie, je vais bien regarder " la floraison de mon cuisse de nymphe émue ... ou pas !!! " Histoire à suivre!
    Bon dimanche

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Laquelle d'entre nous aura la Cuisse la plus émue...
      Histoire à suivre, comme tu dis !

      Supprimer
  3. Je ne possède pas cette rose alors je prends plaisir à regarder celles des copines. Si l'on pouvait avoir un jardin élastique qui permettrait d'y mettre tous nos désirs ! (mais qu'est ce que nous aurions comme boulot aussi). Bonne soirée !

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. C'est parce que j'ai acheté deux fois ce rosier et que j'ai eu deux rosiers différents que j'ai mené l'enquête sur ses origines. Malheureusement, comme toi, le jardin est bien trop petit pour intégrer toutes mes envies !

      Supprimer
  4. Très intéressant ton article Alix ! J'adore 'Cuisse de Nymphe émue' qui m'enchante chaque année ... depuis l'automne dernier, j'ai récupéré un rosier qui serait peut-être 'Cuisse de Nymphe' (vendu comme 'Charles de Mills', je te raconte pas la tête de mon amie !!!) mais je vais attendre la prochaine floraison pour revoir les fleurs et l'arbuste pour tenter de confirmer son identité ... En tout cas, de mémoire, il est magnifique !!! Bises

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Un "Charles de Mills" un peu spécial, en effet !
      Ce serait chouette que tu nous montres des photos des fleurs, ce printemps. J'adore jouer au détective...
      Bises :)

      Supprimer
  5. Bonjour Alix
    j'en possède deux (le deuxième m'a été vendu comme étant conte de Chambord ...) ,mais qui m'ont toujours semblé un peu différents ,les fleurs n'ont pas vraiment la même couleur. Ils croulent tous les deux sous les roses depuis de très nombreuses années .Le problème, c'est qu'ils sont très grands pour mon petit jardin quelque soit la taille que je leur prodigue ,mais ils sont si beaux et tellement odorants que je leur pardonne .
    Je vais les regarder de plus près après ton billet de ce jour .
    Dominique

    RépondreSupprimer
  6. bonjour Dominique
    je viens de tailler les miens sévèrement car leur floraison est déjà finie. Ils se développent beaucoup ! Ces jolies "cuisses" m'ont l'air bien mélangées chez les rosiéristes. La pépinière Guillot m'a vendu un Félicité Parmentier à la place de Cuisse de nymphe émue. Soyons vigilants !!
    Amicalement, Alix

    RépondreSupprimer